Dix artistes rennais.es se sont réuni.e.s pour créer une chanson en amont de la manifestation pour la Journée internationale des droits des femmes. Violences sexistes, discriminations, impunité, sont autant de thèmes abordés dans ce morceau qui appelle à réinventer le système.
“Tempête”. Comme la colère de ces dix artistes, femmes, personnes trans, intersexes et non binaires, qui se sont réuni.e.s autour d’un projet musical à l’occasion du 8 mars, à Rennes. Dans ce morceau qui a résonné tout au long de la manifestation, iels expriment leur ras le bol du patriarcat.
« On prend la ure (rue), dans un fracas. Nous serons tempête, rejoins nous en tête », scande le refrain. Le titre, sorti le 7 mars sur Spotify, se voulait être un appel à manifester pour la Journée internationale des droits des femmes le lendemain.
C’est d’ailleurs dans ce contexte qu’est né le projet. Inspirée par le clip du duo de Rennaises LBLK réalisé dans une manifestation, une militante de l’association Nous toutes 35 avait réunit cinq artistes en novembre dernier en amont de la marche contre les violences sexistes et sexuelles. Après avoir enregistré un premier morceau ensemble, la bande décide de se réunir à nouveau et de s’agrandir pour réitérer l’expérience avant le 8 mars. « On a repris le flambeau, lance Lola, alias Élayïs. Pour nous, c’est nécessaire. On est tous.tes engagé.e.s dans notre musique, c’est ça qui nous a rassemblées.» La chanteuse de 27 ans, interprète depuis trois ans ses textes féministes et anti-racistes sur les scènes de bars et festivals dans la région.
Cette fois, cinq nouvelles têtes s’ajoutent au projet, invité.e.s par Alice, aka Argalouve. La Francilienne d’origine âgée de 30 ans, établie à Rennes depuis une dizaine d’années, concède que le fait d’être dix n’a pas facilité la réalisation du morceau mais l’esprit de collectif a primé. « On s’est dit : on s’en fout de faire un truc à l’arrache, l’important c’est juste de faire un truc ensemble. »
Les dix artistes se réunissent alors autour d’un chocolat chaud, deux mois avant l’échéance, pour faire connaissance et écrire la chanson. Féminicides, viols, impunité, objectification des corps, charge mentale… un objectif : “marquer la fin de leur règne”. « Ce qui est ressorti, c’est qu’on n’avait pas envie de se présenter en tant que victimes mais au contraire, mettre en avant notre puissance, raconte Lola. On parle de se rassembler, se donner de la force et reprendre l’espace public pour lutter contre le patriarcat. » Des notions qui parlent à cette artiste très investie dans le tissu associatif militant rennais. « Je ne pouvais pas imaginer une seconde dire non à un projet comme ça car je suis militante et je ne vois pas mon art sans le militantisme. L’oppression fait partie de ma vie quotidienne en tant que femme et personne noire », ajoute-t-elle, insistant sur l’importance de la dimension intersectionnelle du morceau. “Je n’ai pas d’avenir car ma couleur de peau, mon sexe, mon âge ne cochent pas les cases”, entend-t-on d’ailleurs dans un couplet. Capitalisme, racisme, âgisme et LGBTQIphobies font partie des fléaux dénoncés dans cette chanson qui en veut à tout un système. « Il s’agit de se réapproprier nos vies, se détacher des injonctions et oser dire “allez vous faire foutre maintenant” », résume Alice qui, à côté du rap, travaille en tant que formatrice sur les questions de discriminations, notamment sexistes.
« Cette expérience m’a donné plein d’espoir », lâche Lola qui espère que l’aventure se poursuivra avec l’organisation d’un événement-concert militant pour rassembler une nouvelle fois le collectif. Et de conclure : « On vit dans un monde où on nous a trop pris la parole. Il y a encore trop d’endroits dans le monde où des personnes qui ont le même profil que nous ne peuvent pas s’exprimer. C’est comme un devoir pour moi, de porter ma voix pour elles. »
“Tempête” sur Spotify : https://open.spotify.com/album/1iaWg68Xxb0swZEWx5ZCm3?si=dOH_8wikRC66mZaQq-8weg&utm_source=copy-link&nd=1
Un système qui fait du mâle 